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Que penser du transsexualisme ?

23.02.2004 Thème : Sexualité, homosexualité Bookmark and Share
Réponse de : Jean-Charles BichetJean-Charles Bichet
Bonjour !

La question est très difficile, car elle touche à l'identité de la personne.
Les vrais transsexuels sont des hommes persuadés d'être des femmes, alors qu'ils
sont des hommes, ou des femmes persuadées d'être des hommes, alors qu'elles
sont des femmes.

On parle souvent d'intersexualité, mais cela prête à confusion. Un intersexuel,
c'est un homme qui est non seulement persuadé d'être une femme, mais qui possède
certaines particularités féminines dans son corps. Une intersexuelle, c'est
une femme qui est non seulement persuadée d'être un homme, mais qui possède
certaines particularités masculines dans son corps. Les vrais transsexuels ne
se reconnaissent pas pour intersexuels.

La question est d'autant plus difficile que nous naissons soit garçons avec
des chromosomes X et Y, soit filles avec les seuls chromosomes X. Pourquoi un
homme, qui a les chromosomes X et Y, serait-il une femme ? De même, pourquoi
une femme, qui a les seuls chromosomes X, serait-elle
un homme ? Ces chromosomes, nous les avons au moment même de notre conception
dans le ventre de nos mères. Chacun de nous naît avec un sexe précis, soit masculin,
soit féminin. Bien entendu, il y a les syndromes de Turner et de Klinefelter
(avec les chromosomes XXY, garçons efféminés, ou XXX, "superfilles" à tendances lesbiennes),
mais c'est une autre histoire.

Il y a aussi le fait que nous vivons dans une société qui survalorise le Moi.
Par exemple, j'entends disposer de MA vie, de MON travail, de MES loisirs, de
MON bien-être, de MON corps (piercings, tatouages, etc.) et même de MON sexe.
Je veux être MOI, mais cela n'est pas toujours possible. Nous cherchons à nous
réaliser, à nous épanouir à 100 %... Mais tout ne peut pas marcher comme on
veut. Dur chemin que celui de la réalisation personnelle !

Le transsexualisme, comme l'homosexualité et la bisexualité, touche au domaine
de la vie. Qui dit "sexualité" dit plus ou moins consciemment "bébé". C'est
pourquoi le sujet est tabou. Taboues aussi certaines pratiques sexuelles comme
la masturbation, qui ne visent pas précisément la procréation, mais le plaisir
seul (alors que cet aspect "plaisir" est important lui aussi.) À ma connaissance,
je ne connais pas de position protestante bien définie sur le transsexualisme.
Mais, sans me tromper, je crois que les Églises sont sensibles à la souffrance
des transsexuels. Le phénomène du transsexualisme est cependant trop limité
pour que nous trouvions une position claire des Églises sur le sujet. On parle
beaucoup de l'homosexualité, et plusieurs Églises planchent là-dessus. Mais de la bisexualité,
pas encore. Du transsexualisme, non plus.

En surfant sur internet, j'ai trouvé un document qui nous donne une idée de
la réflexion de certains théologiens catholiques sur le sujet. J'en cite un
large extrait, que j'ai modifié par-ci par-là pour en faciliter la lecture :

"Le transsexualisme (syndrome d?Hirschfeld) et le droit canonique de l?Église
catholique ne font pas bon ménage : lorsque les spécialistes du droit canon
traitent du transsexualisme, ils le font dans la plupart des cas en constatant
l?existence de rapports affectifs et sexuels entre deux personnes de même sexe, au
risque de confondre transsexualisme et homosexualité. En bref, le transsexualisme
peut se résumer pour l?opinion publique à des transformations physiques et des
relations homosexuelles.
Il leur est alors aisé de conclure que le transsexualisme est une réalité sexuelle,
un remodelage physique, qui ne regarde que celui (ou celle) qui la désire, mais
il est aussi et surtout, avant et après l?opération, une réalité sociale complexe
qui interpelle, questionne sur le plan éthique et juridique, imposant de ne pas s?en
tenir aux caractères génitaux externes : le sexe visible suffit-il à me déterminer ?
Suis-je en droit de modifier mon anatomie génitale ? Que deviens-je aux yeux
d?autrui si je décide l?opération chirurgicale ? En définitive, qu?est ce qui
fixe les limites, quelle est ma place dans la société, qui suis-je ?

"La chirurgie de réassignation sexuelle vise à réparer une injustice. Le traitement
chirurgical comme thérapie est une alternative à la souffrance du sujet transsexuel.
Le désir de justice est d?ordre physique, mais aussi social, car le transsexualisme
est, avant tout, un combat contre les préjugés.

"Les effets de cette différence sur la vie en société sont évidents : la condition
marginalise. Le transsexuel focalise sur sa personne tous les préjugés et les
haines. La société sait bien fabriquer ses souffre-douleur : l?obèse, le trisomique,
le handicapé moteur, la personne de couleur, etc. La place accordée à ceux qui n?entrent
pas dans le moule ou ne sont pas dans l?air du temps n?est guère enviable. Quelle
est celle du transsexuel ? Bien qu?on ait vu récemment une personne transsexuelle
(un homme qui a subi l?opération), Georgina Beyer, accéder à un poste parlementaire
en Nouvelle-Zélande, son curriculum vitæ traduit un passé dramatique partagé
par la majorité des transsexuels, à savoir un passage par les milieux de la
prostitution et de la pornographie.

"L?une des difficultés posées par le transsexualisme est celle du mariage. Toujours
selon le droit canon, il est important de distinguer l?attitude à adopter face
à un mariage qui pourrait être célébré après l?opération de celui qui a été
célébré avant.

"Peuvent contracter mariage ceux qui n?en sont pas empêchés par le droit (canon
1058). Nous pouvons noter trois types d?empêchements : administratif, physique
et psychologique.

"Sur le plan administratif, il faut déterminer quel sexe prévaut, de celui d?état
civil (modifié sur décision du juge) ou de celui des registres de baptêmes.
Cette question fondamentale légitime ou non le mariage religieux. Si la théologie
morale de l?Église catholique stipule toujours que c?est le sexe majoritaire, donc
le sexe légal, qui prévaut en cas d?hermaphrodisme, on est en droit de se demander
si la modification d?état civil sera reçue positivement par les canonistes,
ou même, autre cas d?école, si un mariage civil transsexuel sera reconnu comme
valide.

"Sur le plan physique, de nombreux éléments (dysfonction érectile, frigidité,
stérilité) peuvent empêcher le mariage. C?est ainsi que le fait, pour un homme
qui a subi l?opération, de posséder un vagin artificiel ne suffit pas toujours
pour déclarer le mariage valide. Mais en cas de doute, il ne devrait pas être
possible d?empêcher le mariage ou de le déclarer nul. La question de la stérilité
n?empêche pas le mariage, si le fiancé est en mesure de déclarer qu?il n?est
pas impuissant, et à condition bien sûr qu?il ait correctement informé sa fiancée
du fait qu?il est né fille. Sinon il y a tromperie, et le mariage peut être
déclaré nul.

"Une autre difficulté est celle du sacrement de l?ordre. Un homme qui a commencé
par être une fille peut-il devenir prêtre ? Il est nécessaire que tous les séminaristes,
sans exception, fournissent leurs certificats de baptême et de confirmation.
Les séminaristes, également, doivent subir une évaluation de leurs capacités psychiques
à exercer la prêtrise. Un transsexuel devrait, lui aussi, réussir cet examen
pour être consacré prêtre.

"Suite à une opération de réassignation sexuelle et d?une modification de l?état-
civil, on pourrait tout à fait concevoir qu?on ne puisse faire preuve de discrimination
à l?égard d?une personne transsexuelle. Or, un obstacle d?ordre physique a été
fixé de manière inconditionnelle par le premier concile de Nicée. Il s?agit de
la conduite à adopter face à une personne mutilée qui pose sa candidature à
la prêtrise. Ainsi, encore aujourd?hui, sont irréguliers (empêchements perpétuels)
pour la réception (canon 1041.5°) et pour l?exercice (canon 1044 §1.3°) des ordres
: celui qui, d?une manière grave et coupable, s?est mutilé ou a mutilé quelqu?un
d?autre, ou celui qui a tenté de se suicider. La chirurgie de réassignation
sexuelle est, à bien des égards, mutilante. Il suffirait pour nous en convaincre de
penser à la castration, la ligature des trompes de Fallope ou plus particulièrement
à l?ablation des seins qui est une étape symbolique chez la transsexuelle, le
premier acte de suppression d?un indice visible de féminité.

"Il n?est pas complètement exclu qu?un homme qui était une fille puisse devenir
prêtre. Mais il aurait l?obligation de garder la discrétion à ce sujet. Il n?aurait
pas la permission de claironner son identité sexuelle du haut de la chaire,
sinon il risquerait de choquer les paroissiens et de diviser la communauté ; il pourrait,
pour cette raison, être révoqué par l?évêque du diocèse, en qualité de personne
inefficace et même nuisible..."
(d'après Laurent Kondratuk, de Strasbourg.)

Ce texte est très intéressant. Cela montre bien qu'il y a une réflexion qui
se fait en profondeur. En attendant de voir cette réflexion se développer, je
voudrais vous dire que l'Église a le devoir de suivre l'exemple du Christ, en
accueillant tout le monde, quelle que soit la couleur de sa peau ou son orientation
affective et sexuelle. Les transsexuels ont aussi quelque chose à nous dire.
Peut-être pourriez-vous demander à vos amies ce qu'elles pensent de tout ce
que je viens d'écrire, et ce qu'elles disent de Jésus, notre Seigneur, qui nous
aime et a donné sa vie pour nous tous ?

Bien amicalement.



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