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Votre question n’est pas très claire. Pensez-vous à prier les morts, dans le sens de leur demander quelque chose ou de prier pour eux, dans le sens de les aider quand ils sont morts ?
Prenons les deux cas.
Demander quelque chose à un défunt ?
Oui et non ! Non, si nous pensons qu’ils vont pouvoir agir, influencer le cours des choses. Quand on est mort, on est mort et l’une des caractéristiques de fait d’être mort c’est de ne plus pouvoir ni vivre ni agir. Il y a une rupture de fonctionnement entre le monde des morts et celui des vivants. Maintenant, s’il s’agit de penser à eux, d’invoquer ou d’évoquer ce qu’ils nous diraient ou feraient dans telle situation s’ils étaient en vie, cela est possible, peut même être une bonne chose. Attention, toute fois, à ne pas les idéaliser ou leur faire dire ce que nous voudrions entendre !...
Prier pour les défunts :
Non, sûrement pas si c’est dans le sens d’atténuer une éventuelle peine dans le monde de la mort. Cette idée déforme complètement le message du Christ, car elle réintroduit celle d’un jugement porté par un dieu totalement humain : punir les méchants et récompenser les gentils. Elle repose également sur la notion de purgatoire qui est une pure invention du haut Moyen-âge. Cette idée, combattue par le protestantisme, repose sur la notion d’une purification par laquelle il faudrait passer pour « aller au ciel », or le Christ est venu pour le pardon, expression de la justice de Dieu et non pour la condamnation et c’est lui qui nous purifie, nous rend justes devant Dieu : « Dieu a ressuscité Christ pour faire de nous des justes » s’écrie Paul (Epître aux Romains ch. 4 et 5). Cela heurte notre propre désir de justice : nous aimerions tellement que les bons soient sauvés mais pas les méchants, qu’ils soient plutôt condamnés et brûlent en enfer. La bible elle-même reflète ce désir, p. ex bien des paumes. Mais justement cela ne se passe pas comme ça : les bons et les méchant sont également respectés par Dieu, voyez la parabole du bon grain et de l’ivraie (Matthieu 13, 25 et suivants).
Cependant ma pratique pastorale m’a fait découvrir et comprendre que la communion des saints englobe le monde des vivants et celui des morts, donc la prière pour les défunts n’est pas « impossible » encore fait-il savoir pourquoi l’on prie et comment. Elle n’a pas de sens si elle exprime une volonté de maitrise et de puissance sur les morts, au même titre que les relations qui existaient sur terre. La fameuse histoire du riche et du pauvre Lazare (Luc 16,19-31) est riche d’enseignement sur ce point. Mort, le riche s’adresse à Abraham pour lui demander de transmettre ses ordres à Lazare, mort aussi, qu’il continue donc à considérer comme son esclave. La parabole parle d’un fossé infranchissable entre le monde de Lazare et celui du riche, un fossé comme une protection. On ne refait pas sa vie après la mort. De plus, il n’y a pas, dans le christianisme et contrairement à d’autres religions au temps de Jésus, l’idée que les morts continueraient à influencer la vie des vivants.
Là où une relation peut se comprendre entre la vie et la mort, c’est déjà dans la louange pour ce que nous avons reçu de ceux qui nous ont quittés, ce qu’ils ont fait pour nous et ce que nous avons fait ensemble. C’est également dans la foi et la confiance qu’avec la vie, la mort, la résurrection de Jésus et l’annonce de son retour, la mort est désormais habitée. Elle est habitée par le Vivant, le Premier-né d’entre les morts (autre nom donné au Christ). La bible le proclame : « La mort a été engloutie dans la victoire. Oh, Mort, où est ta victoire ? » (1Corinthiens 15, 54-55) et l’Eglise le chante : « Il s’est levé le Fils de Dieu, alléluia !... » (Recueil de chants suisse romand, N°307). Il n’y a donc pas de crainte à avoir : la mort n’est pas un trou sans fond, elle est habitée. Quand nous en passons le seuil, nous y sommes accueillis par le Christ. Ses mains sont là, tendues, ouvertes qui nous accueillent, nous recueillent et nous invitent à sa table. Le lien entre la vie et la mort est donc une relation de confiance entre nous et les bien-aimés que nous avons remis au Vivant.
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