Peut on comprendre la vie sans comprendre la mort?
1) comment vous comprenez dans un contexte d'un culte d'action de grâce en mémoire d'un être cher ecclésiaste 3: 1-12
2) certains théologiens ne sont pas d'accord avec ecclésiaste" qui dit qu'il y a un temps pour tout, car même si on pleure , on peut aussi avoir de l'espérance en Dieu. Qu'est ce que vous pensez de cette façon de comprendre ce texte)
3)Certains théologiens ne croient pas qu’après la mort on retrouve pas ceux qui nous ont précédés( nos êtres chers qui sont morts;est -ce que c'est en référence à 1corinthiens 15 qui parle des corps célestes qui sont différents des corps terrestres.Semé corps naturel , on ressuscite corps spirituel.'(1corinthiens15: 44)qu’est ce que vous en pensez?
4) Comment comprendre1corinthiens15: 35-50
Amitiés?
lebajec
Vos quatre questions sont
liées aux thèmes de la vie, de la mort et de la résurrection. Cela est
intéressant, car on ne peut comprendre la vie sans comprendre la mort, pour le
moins sans en accepter le caractère inéluctable.
1)
Vos
deux questions sur l’Ecclésiaste:
Je ne peux me prononcer sur la pertinence
de ce texte dans le cas que vous citez d’un culte lors du décès de quelqu’un
que vous aimiez. Cela relève de la responsabilité pastorale du célébrant et de sa
connaissance de la vie, de la famille et des amis de la personne défunte.
Le livre de l’Ecclésiaste
C’est un livre difficile. Il tient plus du traité d’un sage, d’un philosophe
que de celui d’un pratiquant, voire d’un croyant au sens moderne. Son titre
déjà est compliqué : il vient du mot hébreu qo’él qui veut dire
appel ou appelé et qui a donné qa’al
qui veut dire assemblée (rassemblement des appelés), d’où la traduction
habituelle, qui vient du grec, d’ecclésiaste, c’est-à-dire membre
(ou président) de l’ecclésia, soit l’assemblée ou Eglise dans le sens
d’assemblée de gens appelés. Mais, à l’époque de la rédaction du livre, cette
assemblée pouvait fort bien ne pas être religieuse, comme une Eglise d’aujourd’hui,
mais bien plus un lieu de débat sur le sens de la vie, ou son non-sens…
L’Ecclésiaste est donc considéré de
manière générale comme un recueil de textes, de phrases ou de sentences d’un ou
plusieurs sages qui décriraient les absurdités et les contradictions de la vie.
Un livre d’un ‘désabusé’ en quelque sorte mais d’un désabusé qui « réagit
contre le conformisme des sages, leur rhétorique vide, pour exhorter l’homme à
l’engagement dans l’existence », comme le propose l’introduction de la Traduction
Œcuménique de la Bible (TOB), une bonne façon d’entrer dans ce livre.
Que dire de votre passage ? Il
propose une façon de penser le temps en renonçant à en posséder l’origine,
davantage encore à la maîtriser. Ce que nous avons à maîtriser c’est ce
que nous faisons des temps qui nous sont donnés, cela en acceptant que ce
qui nous est donné est pour la vie et pour la mort. « Le
temps est pour la vie, mais la limite de sa finitude jette notre existence
dans l’horizon d’un pour la mort ». (M. Faessler, Qohélet
philosophe, Editions Labor et fides, Genève 2013, p. 75). Qohélet ne fait
pas l’éloge de la vanité, mais invite son lecteur à recevoir le ou les temps
qui nous sont donnés, et même celui de la mort, comme un don, -même
si, parfois, ce don est incompréhensible-,
et à les investir de sa présence et de sa vie. L’enjeu est celui de l’éthique
plus que de la philosophie.
2)
Vos
deux questions sur 1Co 15 :
Je crois fermement à la résurrection du Christ qui a fait de lui le Premier-né
d’entre les morts et donc que je suis promis à le rencontrer vivant dans ma
mort comme dans ma vie, dans l’avant et dans l’après.
Croire que Christ est ressuscité est
un point central de la foi chrétienne. Donc si on doute de la possibilité de la
résurrection, on doute de celle du Christ : telle est la logique empruntée
par Paul, car à son époque aussi (déjà !) on pouvait douter de la résurrection
tant chez les Juifs (les sadducéens, Mt 22,23) que chez les Romains. Mais croire
que ce Jésus de Nazareth crucifié était fils de Dieu, était tout aussi scandaleux
(Mt 26,65), illogique, voire stupide !
L’image que Paul emprunte, celle des
corps qui naissent corruptibles et ressuscitent incorruptibles, veut dire deux
choses : tout d’abord que c’est bien le corps de quelqu’un, la personne et
son identité propre qui ressuscite, il y a donc un lien personnel entre le mort
et le ressuscité, c’est la même personne qui reçoit cette vie nouvelle, dans la
mort, et ensuite qu’il y a un changement radical d’être, de statut pourrait-on
dire. C’est bien vous qui ressusciterez mais vous serez totalement nouveau,
renouvelé : du grain on passe au fruit. C’est dans ce sens qu’on peut parler
de la mort comme d’une nouvelle naissance. Les orthodoxes annoncent parfois le
décès de quelqu’un en disant : « X est né/e au ciel ce jour… »
Qui retrouve-t-on au ciel ? Tout d’abord
nous ne savons rien de cette vie qui nous attend, ni comment on sera, ni où, ni
quand. Encore moins comment on y vivra : mangerons-nous, serons-nous
habillés… ? De plus on ne décide pas qui ressuscite et qui ne ressuscite
pas, donc on ne choisit pas qui on retrouve et qui on ne retrouve pas ! De fait, si on est dans
une logique absolue, selon qui on retrouve au paradis, ça pourrait être l’enfer !
La vie après la mort est une promesse, et une bonne promesse, faite par Dieu :
ne craignez pas la fin de la vie. La mort est une réalité qui sera un jour la
vôtre (on retrouve notre Ecclésiaste !) mais, depuis que mon Fils l’a
traversée et s’y est relevé vivant, la mort est habitée. Ne craignez donc pas
la mort, j’y suis !
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