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C’est une sacrée question, qui nous touche tous ! Merci de l’avoir
posée. Elle touche au mystère du mal, de la puissance et de la liberté de Dieu,
de la lutte entre mal et bien, de la volonté de Dieu.
Voyons d’abord quelques mots qui,
dans la Bible, peuvent désigner l’enfer ou séjour des morts: Shéol,
Hadès, Géhenne :
Le Shéol en
hébreu est le lieu où Dieu ne parle plus, le lieu de la non-parole, du
silence de Dieu. Cela équivaut à son retrait, à son absence, à l’absence de
toute bénédiction ou, même, de malédiction qui est toujours mieux que l’absence
de la Parole de Dieu. Ce mot est peu fréquent, on le trouve essentiellement
dans les textes sapientiaux comme les psaumes et Job, mais le psaume 49,16
annonce déjà que ce lieu sera aussi visité.
En grec on a le mot assez fréquent de Hadès,
le séjour des morts dans une conception influencée par les religion de l’Egypte
ancienne, par exemple en Lc 16,23 où, là, on a le sens d'un lieu de
tourments, de souffrance et de flammes; et celui de Géhenne
(12 fois dans NT, uniquement dans les évangiles), dans un sens plus proche
de la conception juive du lieu de la mort éternelle, de la mort de la Parole de
Dieu, voyez en Mt 10,28.
Venons ensuite aux difficultés
de votre question :
Première difficulté :
Jésus lui-même annonce sa mort et sa résurrection : «Il faut que le Fils
de l’homme soit livré, qu’il meure et que, trois jours après il ressuscite» (Mt
16,21 et textes parallèles), ce qui provoque la stupéfaction scandalisée de
Pierre (Mc 8,31-33) et, même après la résurrection, l’incompréhension des
autres disciples (Lc 18,34 et 24,13-35).
Deuxième difficulté, peut-être
plus grande encore : le geste de Jésus qui donne lui-même la bouchée de
pain à Juda et où le texte précise : «à ce moment Satan entra dans Judas…»
(Jn 13,26).
On sent donc bien qu’en même
temps que Jésus va être livré, trahi, condamné, il participe à ce qui lui
arrive, le subit et le maîtrise en même temps.
Deux mots au sujet de la
mort de Judas :
Deux seuls passages parlent de
la fin de Judas, mort ou suicidé, on ne sait pas. Son suicide est attesté en Mt
27,5 sa mort par accident en Ac 1,18.
Mais son geste et sa mort provoquèrent les disciples. Le livre des Actes
nous en parle de manière claire (Ac 1,12-26) : après la mort,la
résurrection et le départ de Jésus, Pierre précise qu’il s’agit de prendre acte de ce qu’a
fait Judas et de sa fin, d’accepter «qu’il fut un des nôtres et avait reçu sa
part de notre service». Il n’y a, dans la bouche des apôtres, aucun jugement
moral sur Judas et son acte. Il y a même la référence à la volonté de Dieu et à
l’accomplissement obligé des Ecritures (l’Ancien testament) : «Il fallait
que s’accomplisse ce que l’Esprit Saint avait annoncé dans l’Ecriture, par la
bouche de David, à propos de Judas devenu le guide de ceux qui ont arrêté Jésus»
et Pierre cite deux psaumes où il est question que d’autres "prennent la charge
laissée par les impies et n’habitent pas chez eux" (Ps 69,26 et 109,8). Donc,
malgré le drame, il s’agit de continuer à servir Dieu et de tout faire pour
éviter la contagion du mal. Et, à la fin de ce discours, Pierre prie
ainsi : «Toi, Seigneur, qui connais les cœurs de tous, indique celui que
tu as choisi, pour qu’il prenne, dans le service des apôtres, la place que
Judas a laissée pour aller à la place qui est la sienne». Aucune condamnation
donc, seulement la relation des faits et une immense confiance en Dieu.
Le mystère demeure :
On ne sait pas où est Judas,
mais cela est-il important ? Nous ne maîtrisons pas les pensées et décisions
de Dieu ! Il fallait que Judas fasse ce qu’il fît pour que Dieu, en Jésus,
aille dans ce lieu de l’absence de toute parole de Dieu, y soit présent et y
parle. C’est le grand mystère d’un Dieu qui utilise même le mal pour accomplir
son projet d’aimer l’humanité jusqu’au bout. Cela seul compte : avec celle
de Jésus, la mort devient habitée. C’est dans ce lieu qu’a retenti en tout
premier l’annonce de la résurrection. Je ne sais donc pas si Judas est encore
en enfer mais ce que je sais c’est qu’avec Christ, la mort est désormais
habitée, et pour toujours, que le séjour des morts a été forcé cf. 1Co
15,54-57 : «Ò mort, où est ta victoire ?» Voyez aussi le cantique
protestant de Pâques : «la mort a cru le prendre, elle a dû le rendre» ou
le refrain orthodoxe : «A ceux qu’enferment les tombeaux, Christ a donné
la vie».
C’est donc ainsi que je désire
et peux répondre à votre question.
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